LE SONNEUR DE CLOCHES

En consultant mes archives familiales, j'ai constaté la place prépondérante que tenait le sonneur de cloches du village. J'ai retrouvé la manière dont il était recruté, leur activité, leur salaire. Souvent dans romans du terroir, on évoque la place essentielle du clocher dans la vie de tous les jours. Les sonneries des cloches, ponctuaient les activités agricoles. (Angélus du matin, midi et soir). Le dimanche, l'appel des fidèles se faisait à l'aides cloches. Il y avait aussi les sonneries qui marquaient des évènements d'importance. Les incendies, les alertes, la guerre. Rappelez-vous l'annonce de la grande guerre de 14/18, c'est le tocsin qui a ameuté la population.  D'autres sonneries annonçaient, les naissances, les baptêmes, les communions et le glas pour les morts. Selon la pratique du moment, on pouvait savoir en écoutant les sonneries, s'il s'agissait d'un homme ou d'une femme qui était trépassé. En somme, les cloches servaient de téléphone. Évidemment à comparer avec notre époque celà fait sourire. Pour la petite histoire, les cloches sont faites avec un alliage de cuivre d'étain et de zinc (Les bronze). Ce n'est pas cette alliage qui différencie le son d'une cloche, mais son diamètre.. Pour que le son se répartisse le plus loin possible dans la campagne, il fallait un point haut pour leur installation, d'ou le clocher.Ce clocher, c'est l'embléme du village. Tant que le clocher est debout le village existe. Notre clocher de ROUMARE est placé au centre de l'église. Ce n'est le cas partout. Dans certains lieux, il est sur le coté, voir même indépendant de l'édifice, comme les campanules.  L'outil principal du sonneur, c'est la corde de chanvre torsadée qui venait bien souvent des chanvrières du village. Dans chaque pays, il y avait le cordier, c'est d'ailleurs un patronyme très répandu dans nos contrées. La longueur de la corde variait avec celle de la hauteur des cloches. Elle se faufilait par un trou du plafond. Celui-ci ovalisait par l'usage, est toujours bien visible. Le sonneur, par une traction puissante, actionnait le battant est mettait en branle la sonnerie. Je me souviens de cet exercice musculaire qui requérait puissance et synchronisation. Qu'elles étaient les qualités d'un bon sonneur? La ponctualité, la disponibilité (Pas de vacances). Il ne s'agissait pas de sonner l'angélus avec cinq minutes de retard, car toute la vie agricole s'en trouvait perturbée. Le sonneur de cloche, c'est l'horloge du village. Parfois, dans certains villages, cet emploi revenait à un handicapé. Pour nous à Roumare, cette tradition de sonneur revenait à une famille Les Devillers. D'ailleurs, la dernière en date de cette lignée, est toujours très attachée à cette histoire. Mais la mécanisation, l'électrification à mis fin à son emploi. Ce n'était pas une mince affaire que d'entretenir ces cloches. Il fallait veiller à la corde, aux coussinets, au battant. Chasser du clocher les intrus, chouettes, corneilles et pigeons. Lorsque le maire l'éxigeait, le sonneur devait se mettre à la disposition de la collectivité, pour les sonneries particulières comme le tocsin en cas d'incendie. Les sommes allouées pour cette fonction était de l'ordre de 3 louis et demi en 1907.  Pour les sonneries particulières comme les mariages, les sonneurs étaient retribués par les familles. Aujourd'hui, que reste-il de cette époque? Je suis persuadé que si vous demandez aux habitants du villages, combien il y a de cloches dans notre église, la réponse sera bien amusante. Et pourtant, savez-vous que lors de la remise en fonction de la grosse cloche, le nom des anciennes familles y sont gravés? Le temps passe, les traditions s'estompent, la mécanisation à déshumanisée notre société. Devons nous le regretter? Oui dans la mesure ou cette modernité fait perdre l'esprit du village. Ne dit-on pas l'esprit de clocher.