PAYSAGES PERDUS

Lorsque l'on vient à la campagne, c'est pour retrouver ses racines, retrouver des paysages qui nous sont familiers, retrouver une quiétude de vie perdue dans les agglomérations. D'ailleurs si nous regardons de plus près ce mot agglomération, on note une connotation d'agglomérée, c'est-à-dire concentration. À l'inverse, à la campagne c'est l'espace qui domine notre attention, un espace agrémenté par la végétation et le bâti. Tout doit être en harmonie de manière à ne choquer personne dans sa vision habituelle de la campagne. Les villages obéissent donc à cet impératif de fluidité qui conditionne notre perception visuelle. Les constructions nouvelles doivent s'intégrer en parfaite harmonie avec l'existant, épouser les formes et les volumes, avoir de l'espace de façon à ne pas offusquer notre vision.

Tout ce que je dis c'est dire l'idéal, évidemment, car on constate malheureusement aujourd'hui que les élus n'ont plus cette sensibilité qui est notre. Pour avoir plus d'habitants, on dénature notre environnement, on empile des lotissements dans des parcelles riquiqui, au mépris des règles certes non codifiées, de la préservation de la nature. Résultat, sur de parcellaires réduits, on érige des bâtisses imposantes sans terrain aux abords afin d'augmenter les capacités de constructions. Par la même, les élus qui sont payés en fonction du nombre d'habitants reçoivent plus en émolument, et tout ça au mépris  de notre patrimoine foncier. Surtout n'allez pas croire ces mêmes élus qui vous disent, ce n'est pas ma faute, c'est l'administration! etc.. Non, ils sont responsables, car n'oublions pas que c'est le maire qui signe les permis de construire. Regardez à Roumare, le dernier lotissement, s'intègre-t-il dans notre vision de la campagne normande? Bien entendu que non, toutes ces maisons sont certes modernes, mais qu'en est-il de notre patrimoine immobilier?

Pensez-vous sincèrement que ces constructions s'intègrent à la proximité de l'église, bâtiment classé? Il est vrai qu'à Roumare nous sommes habitués à ce genre de dérogation, voyez le tennis couvert à moins de 150 mètres de l'église. Tout cela est frustrant et je comprends la rage des anciens à constater ce  gâchis. Nous avons détruit notre patrimoine, nous sommes devenus une cité dortoir sans âme, une cité reliée au grand Rouen,par un système pendulaire, les gens viennent et repartent, sans s'attarder. Ce n'est pas en galvaudant notre patrimoine foncier que nous allons créer une dynamique d'intégration, car cette dynamique passe par l'appartenance à un paysage, à une image forte, la beauté et l'harmonie du village.